L’AVENUE DE PARIS.

(Initialement avenue de Porchefontaine, en 1671, Grande Avenue puis avenue de Paris en 1682.)



Il aura fallu plus de vingt ans et le secours de Le Notre pour que l’avenue de Paris acquière le profil et la majesté que Louis XIV voulait pour mettre en valeur la majesté de sa demeure.

Sous Louis XIII, il n’existait que deux routes pour parvenir à Paris. La première était le chemin qui contournait au nord la « montagne » du Montbauron, remontait par l’actuelle côte de Picardie pour atteindre Saint Cloud où se trouvait le seul pont sur la Seine. La seconde route partait de l’angle entre la rue de Satory et l’avenue de Sceaux, puis contournait par le sud le Montbauron, traversait en oblique l’axe de la future avenue de Paris pour gagner Sèvres. Faute de pont, elle longeait la Seine pour atteindre Paris par Vaugirard. C’était l’ancien chemin aux bœufs.




En 1660, lorsque Louis XIV décide de l’extension de son palais il n’existe face au château qu’une petite place se prolongeant par une petite allée s’étendant jusqu’au chemin de Sait Cloud. A l’été 1662, il demande à Le Notre d’agrandir son par cet de projeter les plans de sa future ville.  C’est pour Le Notre l’occasion d’exploiter ses dons d’architecte de l’espace. Il faudra tout de même vingt ans pour que les projets murissent et prennent leur forme définitive.
Le premier projet se limite côté ville au tracé de trois allées en patte d’oie, débouchant sur place en demie lune. Trop modeste pour le souverain. Le projet est amplifié pour aboutir au trident que nous connaissons : deux avenues presque aussi importantes
que la centrales, toutes bordées de quatre rangées d’arbres, se rejoignant sur une immense place d’Armes devant son château. Mais c’était sans tenir compte des obstacles que constituent les reliefs naturels.
Plan parcellaire de 1661. Tracé des routes de Paris par Saint-Cloud ou par Sèvres.
Les travaux commencent par le nivellement de la place d’Armes remblayée au moyen des énormes quantités de terre retirées de l’aplanissement du sommet du Montbauron. Viennent ensuite les travaux de nivellement des avenues. L’avenue du milieu voit sa vue bouchée malencontreusement par la masse du Montbauron qui déborde largement l’axe central. Il est décidé de commencer les travaux d’aménagement de l’avenue de Saint Cloud qui constitue alors la voie principale utilisée par le roi et la Cour pour aller à Paris. L’avenue de Paris reste en friche. Cela déplait au roi.
Cette avenue centrale, face à son château dont la vue est bouchée par le relief du Montbauron blesse son amour des grandes et belles perspectives. De plus il veut un accès vers Paris plus rapide. Le pont de Sèvres est projeté. Il est même évoqué de contourner le Montbauron. Projet rejeté. Le roi entend privilégier sa grande avenue monumentale face à son château et a sa chambre. 


Emprise et extension du Montbauron au delà de l'avenue de Paris. Détail plan J.B. Naudin.1715, corrigé.

Le pont de Sèvres n’est construit qu’en 1684, en bois. Il faudra quatre ans pour creuser une tranchée sur le flanc du Montbauron, ouvrir la perspective et niveler l’avenue. Le « remuement de terre » est gigantesque. Il est effectué à la main, à la pioche et à la pelle au prix d’innombrable charrois pour déplacer ces millions de mètres cubes de terre, les extraire et les transportes sur une autre partie du chantier. Il faut se représenter le va et vient de convois de terre et de pierre à l’aide de brouettes, de tombereaux et de hottes d’osier quatre ans durant. Il faut ensuite les répartir équitablement, notamment pour surélever l’avenue au-dessus des étangs de Porchefontaine. Quand on mesure les pentes des rues Montbauron et de l’Assemblée-Nationale actuelles, on se rend compte le l’ampleur de la tranchée creusée.  


Avenue de Paris terminée. Plan Gaspard de Bailleul,1723.

Ce ne sera donc qu’en 1685 que l’avenue sera terminée et prendra son nom définitif d’avenue de Paris. Enfin aménagée, les dénivellations adoucies, l’avenue se présente dans toute sa majesté, descendant en pente douce jusqu’à la place d’Armes. C’est du fond de l’avenue qu’il faut maintenant admirer la perspective du château sur sa butte, telle que le voulurent le monarque et son génial jardinier-urbaniste.


Sources : Le Guillou. Versailles avant Versailles, Ed. Perrin. 2011. // Vincent Maroteaux. Versailles, le roi en son domaine. Ed. Picard.2000.// Jean Castex, Lecture d’une ville, Versailles. Ed. Moniteur, 1979.